Monodies et poliphonies extraites du Codex Calixtinus
Manuscrit compostellan du douzième siècle / Ensemble Venance Fortunat




medieval.org
LP, 1986: Solstice SOL 45
CD, 1990: Solstice SOCD 45







1. Ultreia  [2:56]   cc  117

2. Kyrie cunctipotens genitor  [5:20]   cc  111

3. Regi perennis glorie  [2:40]   cc  94

4. Ad honorem regis summi  [0:55]   cc  115

5. Misit Herodes  [4:46]   cc  109

6. Kyrie rex immense  [2:32]   cc  108

7. Alleluia vocavit Jesu  [4:31]   cc  110

8. Portum in ultimo  [2:11]   cc  107

9. O adjutor  [4:59]   cc  106

10. Ad superni regis decus  [2:37]   cc  98

11. Nostra phalanx plaudat  [3:17]   cc  95

12. Vox nostra resonet  [1:50]   cc  102

13. Benedicamus Domino I  [1:40]   cc  112

14. Benedicamus Domino II  [1:50]   cc  113

15. Benedicamus Domino III  [2:31]   cc  114

16. Congaudeant  [3:03]   cc  96






ENSEMBLE VENANCE FORTUNAT
Anne-Marie Deschamps

Anne-Marie Deschamps, soprano
Françoise Levy, mezzo
Catherine Petit-Heugel, soprano
Dominique Thibaudat, soprano
Bruno Boterf, ténor
Philippe Kahn, basse
Gabriel Lacascade, baryton
Antoine Sicot, basse



Enregistrements réalisés du 10 au 13 spetembre 1985
dans le cadre des carrières Arnaude à Meudon (Hauts-de-Seine)
grâce à l'amicale hiospitalité de Mr ÉLIE GOSSÉ

Prise de son et montage: FRANÇOIS CARBOU
Mastering: RAPHAËL JONIN et FABRICE DELAVEAU (Studio TRANSLAB)

Ⓟ 1985 / 90


English liner notes

Fondé en 1974, l'Ensemble Venance Fortunat est un groupe mixte de chanteurs professionnels qui cherche restituer pour nos oreilles du XXe s. les monodies liturgiques et les polyphonies primitives du Vle au XIIe s. Il s'est placé sous le patronage d'un saint évêque de Poitiers du VIe s., auteur de nombreuses hymnes dont certaines se chantent encore de nos jours.

L'Ensemble cherche, à partir des manuscrits, à retrouver la liberté de la voix non accompagnée, propre aux monodies anciennes. Ce sentiment monodique, vocal avant tout, est présent dans la conception des premières polyphonies et persiste à travers les siècles à côté de courants d'interprétation plus directement "instrumentale", considérée comme moins sacrée.

Dans son interprétation, l'Ensemble respecte le principe d'alternance et de mise en valeur des différents timbres vocaux. Il se libère des conceptions les plus courantes sur la rythmique du Moyen-Age par une recherche très précise des valeurs neumatiques. Vécues comme geste vocal homogène, les formules neumatiques procurent aisance, souplesse et énergie.

Sises à Meudon, Hauts-de-Seine, les anciennes carrières de craie Arnaudet (que l'un de leurs propriétaires, Mr Gossé, a mis aimablement à la disposition de l'Ensemble Venance Fortunat pour les besoins du présent enregistrement) constituent à coup sûr l'une des curiosités les plus méconnues de la périphérie parisienne.

Creusées aux XVIIIe et XIXe s. avec un soin digne à tous égards des carriers médiévaux, leurs galeries s'étendent sur presque deux hectares et ne comprennent pas moins de quatre étages! A la suite de Cuvier, des générations de paléontologues y sont vernis chercher - et trouver - leur provende: fossiles marins, ossements préhistoriques. Dans une étude récente, étayée de nombreux graphiques et mesures effectués sur place, le professeur E. Leipp (du C.N.R.S. et de l'Université Paris VI) a mis en évidence les exceptionnelles qualités qu'offraient ces galeries, sur le plan de l'acoustique, et leur "intérêt considérable" en tant que lieu d'écoute. Un moment promis à la destruction pour cause d'opérations d'urbanisme, cet ensemble a cependant suscité auprès des pouvoirs publics la prise de conscience propre à entraîner son classement et, partant, sa survie dans le cadre du Patrimoine.








En Galice, où l'on célébrant depuis le VIIe siècle la liturgie mozarabe ou hispanique, l'implantation du rite romain ne date que de la fin du XIe siècle (1078). Au début du siècle suivant, les nouvelles dispositions ne s'étaient pas encore tout à fait imposées, les contemporains se plaignant de la confusion qui en résultait. Devant l'affluence croissante des pèlerins, le besoin d'un ordo très précis valant pour témoin exemplaire se fit donc sentir.

Le Liber Sancti Jacobi (Livre de Saint Jacques) répondit à ce besoin de structure liturgique et de valorisation historique, au milieu du foisonnement imaginatif et de la complexité socio-culturelle engendrés par le pèlerinage de Compostelle. Cet ouvrage (sans doute le résultat d'un travail collectif effectué à l'abbaye de Cluny, laquelle a joué un rôle considérable dans l'organisation du dit pèlerinage et l'entretien des routes qui y menaient) consiste en une compilation de textes de provenances, d'époques et de genres fort divers mais qui, pour la plupart, se voient attribuer des auteurs de grande réputation.

Le Codex Calixtinus, qui tire son appellation de la lettre apocryphe du pape Calixte II lui servant de préface (et que l'on peut consulter a la bibliothèque de la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle) en est la copie la plus complète. Peut-être a-t-il été conçu sous la direction d'Aimery Picaud, de Parthenay, des clercs ou des chanoines galiciens envoyés à Cluny pour y poursuivre leurs études ayant probablement contribué à sa rédaction et apporté la touche "locale". L'évêque de Poitiers Venance Fortunat (VIe siècle) s'y trouve plusieurs fois cité, tant dans les pages rituelles que littéraires. Le manuscrit renferme 196 folios de parchemin de 295 x 210 mm, écrits en minuscules françaises du Xlle siècle, et comprend cinq livres: Sermons et offices en l'honneur de Saint Jacques, Livre des miracles, Livre de la translation des reliques du Saint, Geste de Charlemagne, Guide du pèlerin.

La partie musicale se trouve dans le 1er livre. Elle débute par des pièces musicales de pur style grégorien que viennent enrichir des tropes, des séquences et des conduits de procession originaux, ces pièces n'étant pas regroupées par genres (comme c'était alors la coutume) mais se succédant selon l'ordre même suivi à l'office. Chaque pièce est accompagnée d'une rubrique indiquant son origine et, parfois, sa "distribution": enfant, chantre, lecteur (ou ces deux derniers ensemble). La deuxième partie du livre est constituée par un ensemble de pièces polyphoniques, à peu près contemporaines de la rédaction du manuscrit: l'une d'elles porte l'indication perge retro (se reporter en arrière), c'est-à-dire à l'office monodique correspondant ou à la monodie sur laquelle elle s'est greffée. Elles sont toutes à deux parties différentes (à l'exception de Congaudeant, l'unique pièce à trois voix qui, de cette époque, nous soit parvenue). La plupart sont construites selon le principe d'alternance par phrases parallèles, héritage des psaumes hébreux qui imprégnera la poésie latine chrétienne et, plus tard, la poésie de langue romane. Elles obéissent à deux procédés de composition:

— soit celui d'un déchant légèrement orné, où les deux parties sont conçues pour être chantées par des voix de semblables niveaux musical et vocal, la partie supérieure (duplum) comportant à peine plus de mélismes: on y relève un emploi élaboré de mouvements contraires, voire de croisements de voix;

— soit celui de l'organum fleuri, où le chœur tient la partie première de style grégorien sous (ou sur) le soliste, lequel déploie des vocalises parfois fort développées sur chaque syllabe du texte - préfigurant les grands organums de Pérotin (XIIIe siècle) et conçues, déjà, comme un éclatement de la monodie.

De lecture facile pour ce qui concerne la hauteur des sons (neumes sur lignes et couleur différente pour chaque voix), l'écriture musicale employée ne donne en revanche aucune indication quant au rythme - d'où l'extrême attention qu'il convient d'accorder au groupement des sons dans les figures neumatiques.

Pour pouvoir goûter pleinement cette musique, nous devons nous exercer a une écoute tout à fait horizontale - comme si chaque partie suivait son propre cours, ne se préoccupant de simultanéité qu'à l'articulation des syllabes ou au sommet des intervalles consonants: octaves, quintes, quartes. Compte tenu de la réverbération des lieux, cette simultanéité ne demandait pas la même rigueur que de nos jours. Il faut aussi entrer dans un univers sonore où les rapports entre les sons relèvent davantage du système pythagoricien que du système tempéré.

Nous avons opté ici pour une interprétation purement vocale: très précis dans ses rubriques, le manuscrit ne fait mention que de duos cantores. Par ailleurs, les pièces choisies sont pour la plupart des pièces rituelles qui se donnaient dans le chœur du sanctuaire - où les instruments n'ont pas pénétré avant de longs siècles. S'y ajoutent seulement deux hymnes (Ultreia, Ad honorem) qui, chantées par les pèlerins ou l'assemblée, toléraient d'être accompagnées par ces mêmes instruments que l'on peut admirer au portique de la Gloire.

Précieuse recension des traditions musicales du temps et, tout ensemble, porte ouverte sur ses innovations les plus hardies, le Codex projette un éclairage nouveau et approfondi sur ce XIIe siècle qui nous était surtout connu pour sa sculpture et son architecture.


ULTREIA (Dum Pater)

Les strophes de ce poème sont de six vers, avec un refrain de quatre vers sur une mélodie originale. Ces quatre vers contiennent des cris faits de la contraction de plusieurs mots proférés au moment de l'attaque, lors des Croisades. Au latin, ils mêlent du goth, du galicien et du basque. On se trouve là devant un des aspects les plus populaires de Saint Jacques: le matamore protecteur des familles. Cette pièce prend place à la fin du recueil polyphonique. La musique est indiquée en neumes aquitains, sans lignes.

KYRIE CUNCTIPOTENS (mode de ré, authente)

La partie monodique grégorienne se trouve dans l'Ordinaire de la Messe de l'Edition Vaticane (Kyrie IV, Xe siècle). Le trope littéraire serait du moine Tutillon de Saint-Gall (+ 916), un contemporain du premier "tropeur" connu: Notker. Pour le faire entendre, nous avons inséré ici celui en déchant du manuscrit de Milan (cantus firmus doublé à l'octave). En troisième lieu, vient le trope de notre Codex: la partie soliste, traitée en organum fleuri, est attribuée A un certain Gauthier de Château-Renault.

REGI PERENNIS GLORIE (3ème ton, sol)

Dans la partie monodique du manuscrit, la teneur de ce chant tient déjà lieu de Benedicamus à une messe "farcie" de Fulbert de Chartres. On l'attribue à un anonyme docteur galicien. Quant au duplum fleuri, il est de ce même Gauthier rencontré précédemment (Magister Gauterius de Castello Ranardi decantum fecit).

AD HONOREM (5ème ton, fa)

Très populaire en Galice (ainsi d'ailleurs que la pièce précédente), cette hymne est la seule composition musicale attribuée a Aimery Picaud. Il manque au manuscrit le folio 191 qui contenait les neuf autres strophes (on les trouve dans d'autres copies).

MISIT HERODES (5ème mode authente, fa avec si naturel)

Répons de l'office de Saint Jacques. La teneur monodique se trouve dans la 1ère partie du livre. Le duplum, très fleuri, serait d'un certain Aton de Troyes (+ à Cluny en 1185) qui se voit également attribuer d'autres pièces, parmi les plus importantes du manuscrit. Cet Introït a inspiré Guillaume Dufay (+ à Cambrai en 1474) qui a composé une messe complète en l'honneur de Saint Jacques.

KYRIE REX IMMENSE (8ème ton, sol)

Ce Kyrie - dont la version monodique est indiquée dans l'Edition Vaticane sous le nom d'une autre trope (Pater cuncta) - figure déjà dans la partie monodique du manuscrit, dans la très inventive messe "farcie" attribuée à Fulbert de Chartres (+ 1028) qui serait également l'auteur de la version en déchant de la 3ème partie.

ALLELUIA VOCAVIT JESU (mode de ré authente, 1er ton)

Omniprésent dans les offices de Saint Jacques, soit par le texte (dans divers répons), soit par le thème musical, cet Alleluia - sous sa forme monodique - se retrouve curieusement traduit en grec à la fin du manuscrit. L'organum fleuri est attribué A Gosselin de Soissons, évêque de cette ville de 1126 A 1152.

PORTUM IN ULTIMO (ré plagal)

Cette prose est également attribuée à Athon de Troyes. Elle dénote une grande pureté dans l'emploi des consonances,alliée à une belle connaissance de la voix.

O ADJUTOR (mode de ré authente, 1er ton)

Sous sa forme monodique, ce grand répons est attribué au pape Calixte II: c'est dire la faveur dont l'ont entouré les auteurs de la compilation. Dans les mélismes de l'organum (qui auraient pour auteur Aton de Troyes), on retrouve une grande partie des formules de jubilation vocale connues au XIIe siècle.

AD SUPERNI REGIS DECUS (mode de ré plagal, 2ème ton)

Attribué à maître Albert, archevêque de Bourges, ce trope de Benedicamus est l'une des compositions les plus intéressantes du manuscrit: les versets alternent deux par deux dans un contrepoint de mouvement contraire presque parfait. Sur chaque finale, les deux voix chantent un pneuma (utilisation du reste du souffle) semblable, mais décalé - effet qui n'est pas sans rapport avec certaines musiques d'aujourd'hui...

NOSTRA PHALANX PLAUDAT (mode de ré authente)

Cette hymne en conduit a deux voix, dont le refrain était probablement repris par le choeur, est encore attribué à Aton de Troyes mais pourrait également trouver ses origines à Saint-Martial de Limoges.

VOX NOSTRA RESONET (mode de sol)

Cette curieuse petite pièce (dont le duplum paraît avoir été composé en premier) est attribuée à un certain Juan Legalis dont on ne sait s'il était français ou espagnol, mais qui s'avère ici un théoricien inventif: la partie de teneur dessine un accord parfait de façon répétitive, selon un procédé très peu usité à l'époque.

BENEDICAMUS

Très courts organums fleuris sur des teneurs liturgiques encore en usage dans le répertoire grégorien:
a. (corde fa, finale mi) pour les vêpres ordinaires en dehors du Temps Pascal,attribué à un autre maître troyen: Droard;
b. (ton 5) pour les fêtes des Saints, attribué au même Droard. Il semble exploiter le mode qui deviendra notre ut majeur;
c. (ré plagal, ton 2) pour les fêtes solennelles, attribué à Gauthier de Château-Renault (dont se manifeste à nouveau le sens de la coulée vocale). Son origine se trouverait dans un répons de Saint-Martial de Limoges attribué parfois à Fulbert de Chartres (Stirps Jesse).

CONGAUDEANT

La plus audacieuse du recueil et, peut-être, de tout le XIIe siècle, cette pièce allie la technique du conduit en déchant et celle de l'organum fleuri. Les deux premières voix sont traitées comme un conduit A deux parties; une troisième partie (triplum) est ajoutée, beaucoup plus mélismatique. La synchronisation entre ces parties indépendantes pose quelques problèmes qui témoignent de la grande liberté de l'époque par rapport à une métrique précise. Attribuée à maitre Albert de Paris, qui fut chantre de Notre-Dame en 1147 et mourut vers 1180.

ANNE-MARIE DESCHAMPS


GLOSSAIRE

Contrairement aux autres formes de polyphonie du XIIe siècle, les hymnes en CONDUIT ne sont pas construites sur une base monodique connue. Les voix, d'une importance égale, ont donné lieu à de nombreuses inventions contrapunctiques.

Le DECHANT est un contrepoint appliqué sur un chant déjà existant (cantus firmus ou teneur). A partir du XIIe siècle, le cantus firmus est souvent inventé.

Dans l'ORGANUM, une ou plusieurs voix s'"organisent" sur une base liturgique connue, en se différenciant point contre point (cf. DECHANT). Dans l'organum fleuri, la teneur - exécutée par un ensemble, en valeurs très étirées - est "fleurie" (= décorée) par les improvisations du soliste.

La TROPE est la greffe note pour note (ou syllabe pour syllabe) d'une musique (ou d'un texte) - et quelquefois les deux - dans un chant déjà existant.








In Galicia, where the Mozarabic or Spanish liturgy had been celebrated since the 7th century, the Roman rite only began to make its appearance towards the end of the 11th century (1078). Even at the beginning of the following century, the changes had not been universally adopted and the resulting confusion gave rise to many complaints. In the face of an ever-increasing number of pilgrims it became obvious that a precise ordo, which could be referred to and used as an example, had become a real necessity.

In the midst of the socio-cultural complexity which characterized the mass of pilgrims who came to Compostela and the imagination and inventiveness they inevitably brought to the liturgy, the Liber Sancti Jacobi fulfilled the need for a liturgy that was structured and historically sound. The Book is the result of what was most probably a collective effort of a group in the Abbey of Cluny, which played an important part in the organization of the pilgrimages and the upkeep of the roads leading to the shrine. It consists of a compilation of texts of diverse sources, periods and kinds, but which for the most part were by authors of considerable repute.

The most complete copy of this work is the Codex Calixtinus, named after the apocryphal letter of Pope Calixtinus II which serves as its preface and which may be seen in the Cathedral library of Santiago de Compostela. It is possible that it was compiled under the guidance of Aimery Picaud of Parthenay; clerks or canons from Galicia, sent to Cluny to complete their studies, having doubtless helped to complete the task and added their own touches of local colour. Venance Fortunat, Bishop of Poitiers (6th c.), is mentioned several times, both in the literary pages and those concerning the ritual. The manuscript consists of 196 parchment folios, written in 12th c. French small lettering and measuring 295 x 210 mm. It contains five books: Sermons and offices in honour of St James, The Book of miracles, The Book of the translation of the Holy Relics, "Geste" of Charlemagne, The pilgrim 's Guide.

The musical part is to be found in the first book. It begins with pieces in the pure Gregorian style, enriched by tropes, sequences and original processional conducti; the pieces are not grouped according to type, as was the usual practice, but are set out in the order of the office. The source of each piece is indicated as is its manner of performance: by a child, cantor or reader (or the last two together). The second part of the book is a collection of polyphonic compositions which are more or less contemporaneous with the drafting of the manuscript; one of them is marked perge retro (see previous pages), that is to say: refer to the corresponding monodic office onto which the polyphony is grafted. All the pieces have two independent voices (except the Congaudeant, the only three-part piece of the period which has come down to us). Most are built on the principle of alternation by parallel phrases; a legacy of the Hebrew psalm, found in the Latin poetry of the Christians and later in other languages of Latin origin. Two methods of composition are used:

— the discant, lightly ornamented and sung by two similar voices with only a few extra melismata in the upper voice (duplum). There is an elaborate use of contrary motion, even to the crossing of the vocal lines;
the florid organum, in which the choir sings the principal vocal line in Gregorian style, below (or above) the soloist who unfurls highly developed vocalises on each syllable of the text, prefiguring the great organums of Pérotin (13th c.) and already conceived as a breaking up of the monody.

Whereas the musical script clearly indicates the pitch of each note (neumes on lines and a different colour for each voice), there is absolutely no guide as to rhythm; the grouping of notes within the neumatic figures therefore requires the closest attention.

To appreciate this music fully, we must cultivate a completely horizontal way of listening, as if each voice followed its own path and only paid attention to synchronization on the articulation of syllables or consonant intervals: octaves, fifths and fourths. In the resonant acoustics in which this music was sung, such synchronization did not require the same precision as it would today. The listener must also steep himself in the sound and colour of the early Pythagorean tuning, very different from the equally tempered scale to which we are accustomed.

We have decided on the purely vocal interpretation: the manuscript, which is extremely precise in its indications, only stipulates duos cantores. Moreover the pieces chosen belong for the most part to the rites which were celebrated in the sanctuary - where many a long century was to pass before instruments were allowed to penetrate. Only the two additional hymns (Ultreia, Ad honorem), which were traditionally sung by pilgrims or the congregation, could be accompanied by those instruments which we can admire in the carvings of the Portal of Glory.

The Codex is an invaluable inventory of 12th c. musical traditions of which it reveals the most daring innovations, but it also throws a new and penetrating light on an era which heretofore we had chiefly appreciated through its sculpture and architecture.


ULTREIA (Dum Pater)

The verses of this poem are of six lines with a four-line refrain on an original melody. These four lines contain battle cries, made up of the contraction of several words shouted at the moment of attack by the Crusaders. They mix Goth, Gallican and Basque with the Latin words. Here is an image of one of the most popular aspects of St James: the dashing killer of Saracens and defender of the family. The piece is to be found at the end of the polyphonic part of the book; it is written in Aquitanian neumes without lines.

KYRIE CUNCTIPOTENS (authentic mode of D)

The monodic, Gregorian part comes from the Ordinary of the Mass in the Vatican Edition (Kyrie IV, 10th c.). The literary trope is probably by Brother Tuotilo of St Gall († 916), a contemporary of the first known troper: Notker. To be able to include this trope, we have inserted an extra piece in discant from the Milan manuscript (cantus firmus doubled at the octave). In third place comes the trope from our Codex: the solo part, treated as florid organum, is attributed to Gauthier of Château-Renault.

REGIS PERENNIS GLORIE (3rd tone, G)

In the monodic section of the manuscript, the tenor (original melody) of this chant already stands in place of the Benedicamus in a missa farsa ("troped" mass) by Fulbert de Chartres. It is thought to have been composed by an anonymous doctor from Galicia. The florid duplum is by the above-mentioned Gauthier (Magister Gauterius de Castello Ranardi decantum fecit).

AD HONOREM (5th tone, F)

A very popular hymn in Galicia (as was moreover the previous piece), this is the only musical composition attribued to Aimery Picaud. A lacuna occurs at this point in the manuscript at folio 191 which, from evidence in other extant copies, contained the nine missing verses.

MISIT HERODES (authentic 5th mode, F with B natural)

It is a responsory of the office of St James. Its monodic version is to be found in the first part of the book. The extremely florid duplum is thought to be a certain Aton of Troyes († in Cluny in 1145) to whom several of the most fully developed compositions in the book are likewise ascribed. Guillaume Dufay († 1474 in Cambrai) was also inspired by this Introït; he composed an entire mass in honour of St James.

KYRIE REX IMMENSE (8th tone, G)

The monodic version of this Kyrie is to be found in the Vatican Edition under the name of another trope (Pater cuncta). It exists in the monodic part of our manuscript in the highly imaginative missa farsa attributed to Fulbert of Chartres († 1028) who is also the probable author of the discant version in the third part.

ALLELUIA VOCAVIT JESU (authentic mode of D, 1rst tone)

The Alleluia, either as a text (in various responsories) or as a musical theme, is omnipresent in the offices of St James. This example, in its monodic form, is curiously translated into Greek at the end of the manuscript. The florid organum is attributed to Gosselin of Soissons, bishop of that city from 1126 to 1152.

PORTUM IN ULTIMO (D, plagal)

Another prose ascribed to Aton of Troyes. lt is remarkable for the extremely pure use of consonant intervals allied to a fine knowledge of vocal art.

O ADJUTOR (authentic mode of D, 1rst tone)

In its monodic form, this great responsory is thought to have been composed by Pope Calixtinus II, which shows in what esteem he was held by the compilers of the book. The melismata of the organum (probably by Aton of Troyes) contain many of the 12th c. formulae of jubilation.

AD SUPERNI REGIS DECUS (plagal mode of D, 2nd tone)

Attributed to Master Albert, archbishop of Bourges, this trope of a Benedicamus is one of the most interesting compositions in the manuscript: the verses alternate in pairs, in contrary motion of contrapuntal perfection. There is a pneuma (continuation of the sound until its extinction) on each final note in both voices, an effect that is not entirely foreign to music of today...

NOSTRA PHALANX PLAUDAT (authentic mode of D)

Another hymn attributed to Aton of Troyes, but possibly originating in St Martial of Limoges. It is a conductus for two voices; the refrain was probably repeated by the choir.

VOX NOSTRA RESONET (mode of G)

A curious little piece (its duplum appears to have been composed first). It is ascribed to Juan Legalis, who may have been French or Spanish but who in any case seems to have been a resourceful theorist; the tenor outlines a common chord in a repetitive manner, a most unusual procedure for the time.

BENEDICAMUS

Three very short examples of florid organum on liturgical tenors which are still in use in the gregorian repertoire:
a. (corda F, final E) for the ordinary vespers outside Eastertide, attributed to Droard who also came from Troyes;
b. (5th tone) for Saint's days, again attributed to Droard. He seems here to be using a mode which was later to become our C major;
c. (plagal D, 2nd tone) for solemn feast days, attributed to Gauthier of Château-Renault whose sense of the vocal coulée is again apparent here. It may stem from a responsory of St Martial of Limoges ascribed to Fulbert of Chartres (Stirps Jesse).

CONGAUDEANT

The most audacious piece of the whole collection and perhaps of the entire 12th c. It allies the techniques of a conductus in discant and florid organum. The two basic voices are treated like a two-part conductus; a third voice (triplum) is added with much richer melismata. The synchronization of these three independent parts creates a number of problems and is a proof of the very free attitude of the period towards rhythmical measure. It is attributed to Master Albert of Paris, who was a canter of Notre-Dame in 1147 and died circa 1180.

ANNE-MARIE DESCHAMPS


GLOSSARY

Unlike other polyphonic forms of the 12th c., the hymns in CONDUCTUS are not based on a known monodic theme. The voices, which are of equal importance, give rise to rich contrapuntal invention.

DISCANT is a counterpoint which is applied to an existing chant (cantus firmus or tenor). From the 12th c. onwards the cantus firmus was often a new melody.

In ORGANUM: one or more voices "organize" a counterpoint to a liturgical melody. In florid organum, the tenor - sung by a group of voices in extended note-values - is ornamented (i.e. decorated "as with flowers") by the improvisations of the soloist.

The TROPE is a musical (or literary) graft, note-for-note (or syllabe-for-syllabe) onto an existing chant.