medieval.org
Opus 111 30-130
1995
1. Madre de Deus, ora por nòs teu Fill' essa ora [2:27]
CSM 422
2. El Cant de la Sibil·la [16:05]
soloist: Gisela Bellsolà
3. Benedicamus Domino [1:44]
codex Las Huelgas, B. D. XII
Hu 40
MISSA DE BARCELONA
4. Introitus [4:01]
chant · ‘Dominus dixit ad me: Filius meus es tu’
5. KYRIE, a 3 [3:44]
6. GLORIA, a 3 [6:47]
Splendor patris in celis oriens
soloists: Catherine Sergent, Caroline Magalhaes, Emmanuel Bonnardot
7. Graduale [4:58]
chant · Tecum principium in die virtutis tuae
8. Alleluia [1:56]
chant · V. ‘Dominus dixit ad me: Filius meus es tu’
soloist: Catherine Sergent
9. CREDO, a 3 [6:40]
Steve de SORT
10. Offertorium [2:12]
chant · Laetentur caeli, et exsultet terra ante faciem Domini
11. SANCTUS, a 3 [4:05]
Sacrosanctus, pater, ingenitus ~ Sanctus miro gaudio
12. AGNUS DEI, a 4 [3:10]
13. Communio [4:38]
chant · In splendoribus sanctorum, ex utero ante luciferum genui te
14. ITE MISSA EST, a 4 [2:45]
Post missarum sollemnia ~ Post missae modulamina
OBSIDIENNE,
vocal ensemble
Emmanuel Bonnardot
Gisela Bellsolà — Sibil·la
Cantus —
Hélène Moreau · Catherine Sergent · Caroline Magalhaes · Yves Guidet
Tenors —
Bruno Bonhoure · Pierre Bourhis · Pierre Briaud · Olivier Germond
Basses —
Emmanuel Bonnardot · Raphaël Picazos · Daniel Sarda · Pierre Tessier
bagpipes · cornemuses —
Pierre Boragno · Pierre Hamon · Florence Jacquemart
drum · tambour —
Pierre Boragno
Outre son travail à la tête de l'ensemble vocal
Obsidienne, EMMANUEL BONNARDOT se produit régulièrement,
comme chanteur et vièliste, au sein de l'ensemble Alla franceses
qu'il cofonde en 1989 (enregistrements Opus 111), en duo avec Dominique
Vellard ou au sein de l'ensemble Gilles Binchois. Il assure —
collégialement avec Brigitte Lesne et Pierre Hamon — la
direction artistique du Centre de Musique Médiévale de
Paris, et enseigne au Conservatoire National Supérieur de
Musique de Lyon.
GISELA BELLSOLÀ se consacre presque exclusivement á faire
vivre la culture catalane : poèmes mis en musique par
elle-même, chansons populaires, ou — pour le
répertoire médiéval — chants de troubadours,
qu'elle chante en duo avec Emmanuel Bonnardot ou invitée par
Gérard Zuchetto.
In addition to directing the vocal ensemble Obsidienne, EMMANUEL
BONNARDOT performs regularly as a singer and medieval fiddle player
with the ensemble Alla francesca, which he co-founded in 1989
(recordings for Opus 111), as a duo with Dominique Vellard, and as a
member of the ensemble Gilles Binchois. He teaches at the Centre de
Musique Médiévale de Paris — of which he is joint
artistic director alongside Brigitte Lesne and Pierre Hamon —,
and at the Conservatoire National Supérieur de Musique in Lyons.
GISEIA BELLSOLA's career is devoted almost exclusively to the culture
of Catalonia — via her own settings of poetry to music, folksong
or, in the medieval repertory, troubadour songs, which she performs in
recitals with Emmanuel Bonnardot or as a guest of Gérard
Zuchetto.
Documentation
EMMANUEL BONNARDOT
Le chant de la Sibylle
ISABELLE RAGNARD
1. CONTRAFACTUM. — Pratique médiévale très
répandue, consistant à écrire des paroles
nouvelles en les adaptant à des mélodies
pré-existantes.
A FEW YEARS AGO, I attended Midnight Mass in Palma de Majorca, along
with a performance of the Song of the Sibyl. I was deeply moved by the
strong sense of tradition, which I rediscovered later when I heard
Gisela Bellsolà and the way she sang the words and brought them to life.
In the meantime, Obsidienne's first read-through of the Barcelona Mass
had given us a strong sense of the lavish splendour of the Papal court
at Avignon, as we sang those flamboyant Gothic polyphonies, which
alternate with sections in plainchant. Once we had added the bagpipe
trio, we were able to produce a Christmas programme with a mixture of
the sacred and the secular, the traditional and the medieval.
The Song of the Sibyl
ISABELLE RAGNARD
Documentary sources and editions used by Obsidienne : See French notes
— Aebischer, Paul, « Un ultime écho de la Procession des
prophètes : le Cant de la Sibil·la de la nuit de
noël à Majorque », Mélanges...
offerts à Gustave Cohen, Paris, 1950, 261.
— Corbin, Solange, « Le Cantus Sibyllae : origines et premiers
textes », Revue de Musicologie, XXXI, 1952, 1-10.
— Chailley, Jacques, L'école musicale de Saint-Martial de
Limoges jusqu'à la fin du XIe siècle (Paris, 1960).
— Gómez, Maria Carmen, « El manuscrito M971 de la Biblioteca
de Catalunya (misa de Barcelona) », Butlleti de la Biblioteca
de Catalunya, vol. Desè, 1982-84, Barcelone, 1986.
— Gómez, Maria Carmen, « Quelques remarques sur le
répertoire sacré de l'Ars Nova provenant de l'ancien
royaume d'Aragon », AMI, LVII, 1985.
Les extraits de la décrétale de Jean XXII sont
empruntés à la traduction d'Amédée
Gastoué dans « La musique à Avignon et dans le
Comtat du XIVe au XVIIIe siècle », Rivista
Musicale Italiana, XI, 1904,
265-91.
Éditions musicales utilisées par l'ensemble Obsidienne
—Anglés, H., La música a Catalunya fins al segle XIII, Barcelona, 1935.
—Stäblein-Harder, H., Fourteenth-century Mass Music in France, CMM29, American Institute of Musicology, 1962.
L'ensemble Obsidienne tient à remercier les Amis de la Musique
Ancienne du Senonnais (AMAS) pour leur contribution à la
réalisation de cet enregistrement.
Centre de Musique Médiévale de Paris
Executive producer : Yolanta Skura • Recording producer, engineer, editing : Laurence Heym
Enregistrement numérique / Digital recording / Digital Aufnahme
Recording : Church of St Tiburce, Sergines, France, June 1995
Cover : Michelangelo, Sibyl of Delphi, Sistine Chapel (detail) D.R.
Cover design : Marguerite Tager · Composition du livret /Typesetting : Peter Vogelpoel
℗ 1995 Original recording made by Opus 111, Paris © 1995 Opus 111, Paris
Ref. OPS 30-130
IL
Y A QUELQUES ANNÉES, j'assistais à la messe de minuit à Palma de
Majorque, ainsi qu'à la représentation du chant de la Sibylle. Choc de
la tradition, choc retrouvé avec Gisela Bellsolà dans sa manière de
chanter et de faire vivre ce texte. Entretemps, la lecture de la messe
de Barcelone avec Obsidienne nous fit découvrir les fastes de la cour
des papes d'Avignon et chanter ces flamboyantes polyphonies gothiques
alternées avec le plain-chant. Tout était réuni, avec le trio de
cornemuses, pour créer un programme de Noël original mêlant le profane
et le sacré, le «traditionnel» et le médiéval.
Au
Moyen Âge, la liturgie de la nuit de Noël est une succession
ininterrompue d'offices religieux. C'est une longue veille dans les
ténèbres qui s'achève au point du jour par l'office des laudes et la
messe de l'aurore. Auparavant, au cœur de la nuit, les chants et
lectures de l'office des matines et de la messe de minuit ont entretenu
les fidèles dans l'espérance de la naissance du Christ. A l'office des
matines, l'attente est soutenue par la cantillation des passages d'Isaïe
annonçant la venue du Messie. Bientôt d'autres prophéties viennent
enrichir la liturgie. La plupart sont extraites de l'Ancien Testament
mais quelques textes d'auteurs païens sont sollicités. Ainsi, à
Saint-Martial de Limoges, au XIe siècle, le jeu liturgique de la
Procession des prophètes du Christ met en scène Moïse, Jérémie, Daniel,
David mais aussi Virgile et la Sibylle d'Érythrée. Singulièrement,
celle-ci n'annonce pas la naissance du Christ mais son retour au jour du
Jugement dernier.
Pourtant, comme l'a montré Solange Corbin,
l'origine du chant de la Sibylle est indépendante du drame liturgique.
La prophétie est rapportée pour la première fois sous la forme d'un
poème acrostiche en grec par l'évêque Eusèbe de Césarée († c. 340). Un
siècle plus tard, le texte est traduit en latin par Augustin (354-430)
dans la Cité de Dieu et reproduit dans le sermon Contra judeos
qui lui fut longtemps attribué. Au Xe siècle, le sermon — supposé de
l'évêque de Carthage — interrompt la lecture de la sixième leçon du
second nocturne de l'office des matines. Il fait partie intégrante de la
liturgie, de même que le chant de la Sibylle, dont la mélodie est notée
à cette époque. Dés lors la popularité de ce chant prophétique va
croissant et les premières versions du texte sibyllin en langues
vulgaires apparaissent au XIIIe siècle: ancien français, provençal,
castillan et surtout catalan.
Le premier vers, «Judicii signum
tellus sudore madescet» — ou sa traduction —, est répété par un chœur
sous forme de refrain en alternance avec les strophes interprétées par
un soliste. Cette interprétation responsoriale, sans doute d'origine
aquitaine (B.N. lat. 1154 de St Martial, Xe s.), est attestée en France,
en Italie et dans la péninsule ibérique. À partir du XVe siècle au
moins, le refrain est chanté en polyphonie à quatre voix. Pourtant,
progressivement, la tradition n'est plus comprise. Ainsi au XVIe siècle,
la plupart des pièces non grégoriennes sont considérées comme des
ajouts qui dénaturent le rite et doivent être supprimées. Le chant de la
Sibylle est presque totalement abandonné à la fin du siècle après son
interdiction par le Concile de Trente (1545-63). C'est ainsi qu'il est
prohibé à Majorque en 1572 puis rétabli trois ans plus tard. En 1666,
les autorités ecclésiastiques cherchent de nouveau à le supprimer et sa
représentation doit faire l'objet d'une autorisation écrite. Elle fut
sans doute établie avec largesse car le chant s'est maintenu dans l'île
jusqu'à nos jours.
La pratique majorquine témoigne d'une
pluralité de traditions. En effet, une attestation du XIVe siècle
indique que le chant en latin était encore pleinement intégré à la
liturgie des matines. En revanche, au milieu du XXe siècle, c'est un
jeune garçon vêtu de rouge et brandissant une épée qui entonne le
premier vers en catalan, «Al jorn del Judici», après le Te Deum final du
même office à la cathédrale de Palma. Cette petite mise en scène est
pour le musicologue Paul Aebischer un «ultime écho de la Procession des
prophètes».
Dans cet enregistrement, Gisela Bellsolà chante une
version traditionnelle catalane. Le refrain polyphonique à quatre voix
interprété par l'ensemble Obsidienne provient d'un manuscrit du début du
XVIe siècle conservé à Barcelone (ms. 7, f.1). La mélodie principale
est confiée au soprano doublé à la tierce par l'alto, tandis que les
autres voix réalisent un contrepoint homorythmique.
En introduction, une Cantiga de Santa Maria d'Alphonse le Sage (1252-1284), Madre de Deus, ora por nés teu Fill' essa ora, est jouée aux cornemuses. Ce contrafactum1
écrit sur la propre mélodie du chant de la Sibylle atteste sa
popularité dans les pays ibériques au XIIIe siècle. Les cornemuses
concluent le chant prophétique par un Benedicamus Domino issu du manuscrit du monastère de Las Huelgas (début du XIVe siècle).
La messe de Barcelone
Au
début du XIVe siècle, le développement de la polyphonie liturgique
semble compromis. D'une part, la musique, comme la société, se
sécularise; ainsi Guillaume de Machaut, pourtant chanoine de la
cathédrale de Reims, compose essentiellement des chansons profanes.
D'autre part, l'Église dissuade les compositeurs d'utiliser les
innovations de l'Ars nova. Ainsi en 1324, le pape Jean XXII installé en
Avignon tente, par décret, d'interdire les pratiques musicales
nouvelles. Il fustige les musiciens qui «enivrent l'oreille sans la
calmer», qui chantent «les mélodies ecclésiastiques avec des semibrèves
et des minimes», enfin qui dénaturent les mélodies par des hoquets2 et
des motets aux paroles frivoles. Aussi, il est paradoxal de constater
que la plupart des polyphonies liturgiques proviennent des chapelles du
Pape et des cardinaux installés en Avignon et dans le Comtat Venaissin à
l'époque de la «captivité babylonienne» (1305-1378), puis du Grand
Schisme (1378-1417).
Les manuscrits d'Ivrée et d'Apt sont les
deux sources principales de ce nouveau répertoire. Ils contiennent des
parties de l'ordinaire de la messe (Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus
et Ite misa est) composées séparément et classées par genre. Ce corpus
est original. Auparavant, en effet, les polyphonies sur les textes
invariables de la messe, généralement chantés par un chœur, sont rares.
Les compositeurs de l'École Notre-Dame (1160-1225) ont ainsi privilégié
les chants du propre, dont le contenu est spécifique à chaque fête; dans
leurs organa seules les parties solistes des chants responsoriaux (Graduel, Alleluia, répons) sont traitées polyphoniquement.
Par
ailleurs, quatre manuscrits — compilés dans les milieux musicaux liés
la cour papale avignonnaise — présentent une sélection des chants
polyphoniques de l'ordinaire présentés selon l'ordre liturgique. Ces
quatre cycles anonymes sont désignés actuellement du nom du lieu de leur
conservation ou de leur découverte. Le plus ancien est la Messe de Tournai,
copiée dans la première moitié du XIVe
siècle, dont s'inspira peut-être Guillaume de Machaut pour
la composition de la Messe Notre-Dame (c. 1363). Viennent ensuite les messes de Toulouse et de la Sorbone (parfois nommée messe de Besançon). Enfin, la Messe de Barcelone
conservée dans les premiers folios du manuscrit 971 de la bibliothèque
de Catalogne fut probablement copiée dans le royaume d'Aragon à la fin
du XIVe ou au début du XVe siècle.
Avec l'émergence de ces cycles
polyphoniques de l'ordinaire, la notion de messe prend sa signification
moderne. Néanmoins le terme ne désigne pas encore une structure
musicale unifiée En effet, la plupart des pièces réunies pour constituer
un ordinaire complet sont des compositions indépendantes. Ainsi le
Gloria, le Credo et le texte tropé du Sanctus de la messe de Barcelone
ont également été copiés, sous forme isolée, dans le manuscrit d'Apt.
Ces pièces empruntées au répertoire avignonnais témoignent des liens
étroits établis entre la maison royale aragonaise et la ville papale. Le
compositeur du Credo, le frère augustin Steve de Sort, fut d'ailleurs
recommandé à Jean Ier d'Aragon († 1396) par son ambassadeur à Avignon.
Engagé comme organiste de la chapelle en septembre 1394, il reste, à la
mort du roi, au service de son successeur Martin Ier († 1410) jusqu'en
mars 1407. Grâce à ces indications biographiques, la musicologue
catalane Maria Carmen Gómez a pu préciser la date de rédaction du
manuscrit de Barcelone, probablement entre 1395 et 1410, soit à une
époque contemporaine du séjour du compositeur à la cour aragonaise.
Les
quatre autres parties de la messe sont anonymes et le cycle manque de
cohérence interne, notamment en raison de la pluralité des techniques
d'écriture musicale utilisées. En effet, au XIVe siècle les mouvements
polyphoniques de l'ordinaire sont composés selon trois styles
essentiels: le style simultané, le style motet et le style chanson. Ce
dernier s'affirme à la fin du XIVe siècle notamment dans le répertoire
aragonais. Cette évolution révèle qu'en dépit des injonctions
officielles des autorités religieuses, la prédominance des œuvres
profanes exerce une grande influence sur les compositeurs de musique
liturgique.
Quatre mouvements de la messe de Barcelone sont à
trois voix. Dans le Kyrie, les voix chantent en contrepoint homophone.
Ce style simultané est perturbé par des syncopes à la fin du Christe et
un hoquet au milieu du deuxième Kyrie. L'écriture du Credo est proche du
style chanson: la voix supérieure (cantus) chante le texte, soutenue par deux voix plus graves (tenor et contratenor). Cette configuration est modifiée dans le Gloria, car le contratenor évolue dans la même tessiture que le cantus; de plus les sections du texte liturgique alternent avec les strophes du trope3 Splendor patris.
Le Sanctus est un véritable motet isorythmique4. Deux voix chantent
chacune le texte d'un trope différent tandis qu'une formule rythmique
identique (talea) est répétée six fois à la troisième voix. La Messe de Barcelone
s'achève par un Agnus Dei tout à fait remarquable: il est à quatre
voix, et par conséquent l'écriture est plus dense que dans les autres
mouvements; un hoquet final anime et donne de l'ampleur à la conclusion
de la messe.
Le cycle «catalan» ne comporte que cinq parties.
Aussi la pièce conclusive est ici empruntée au manuscrit d'Ivrée. Il
s'agit d'un motet isorythmique à quatre voix dont la teneur5 originale
n'a pas été identifiée. Les deux tropes Post missarum / Post missa
se terminent par «Deo gratias» qui est la réponse
usuelle après l'interpellation «Ite missa est» ou
«Benedicamus Domino».
2.
HOQUET. — Technique de composition où les notes d'une mélodie sont
réparties entre deux (ou trois) voix, chacune étant entrecoupée de
silences. Lorsqu'une voix chante une note, l'autre se tait puis chante
elle-même une note, les rôles s'inversant. Ces alternances se font très
rapidement.
3. TROPE. — Texte ou mélodie — ou les deux —
ajoutés à, ou intercalés à
l'intérieur d'un chant pré-existant.
4.
MOTET ISORYTHMIQUE. — Genre médiéval à plusieurs voix, où chacune
chante un texte différent et où la teneur (voir note 5) répète plusieurs
fois la même formule rythmique, dont les valeurs sont généralement
longues.
5. TENEUR. — Mélodie existante servant de base à une
composition polyphonique, les autres voix étant ajoutées au-dessus et
parfois au-dessous.
EMMANUEL BONNARDOT
In
the Middle Ages, the liturgy for Christmas night was one long
succession of religious services. Clergy and congregation would worship
throughout the night, finishing up at daybreak with lauds and the dawn
mass. Beforehand, in the very heart of the night, the chanting and the
readings for matins and then for the midnight mass would have inspired
the faithful with the hope of the birth of Christ. At matins, the
expectation was heightened by the recitation of passages from the Book
of the prophet Isaiah announcing the coming of the Messiah. With the
passage of time, other prophecies were added in order to enhance the
liturgy. Most were taken from the Old Testament, but a few texts of
pagan origin were also included. At Saint-Martial de Limoges in the
eleventh century, for example, the liturgical procession of Christ's
prophets consisted not only of Moses, Jeremiah, Daniel, David but also
Virgil and the Erythraean Sibyl. Strangely enough, the latter did not
announce the birth of Christ but his return on the day of the Last
Judgment.
Nevertheless, as Solange Corbin has pointed out, the
origin of the song of the Sibyl is quite independent from liturgical
drama. The prophecy was reported for the first time in the form of an
acrostic poem in Greek by bishop Eusebius of Caesarea (d. c. 340). A
century later, the text was translated into Latin by Saint Augustine
(354-430) in De civitate Dei and it reappeared in the sermon entitled Contra judeos,
which was for a long attributed to him. In the tenth century, this
sermon, supposedly by the bishop of Carthage, was inserted into the
reading of the sixth lesson of 10 the second nocturne of matins. It was
an integral part of the liturgy, as was the song of the Sibyl, the
melody of which was noted down at this epoch. The popularity of this
prophetic song increased from then onwards and the first versions of the
Sibyl text in vulgar languages — Old French, Provençal, Castillian and
above all Catalan — appeared in the thirteenth century.
The first line,'Judicii signum tellus sudore madescet' (or its various translations), was repeated by
a
choir in the shape of a refrain, alternating with verses sung by a solo
voice. Evidence of this responsorial type of interpretation, which
probably originated from Aquitaine (B.N. lat. 1154 de St Martial, tenth
century) is to be found in France, Italy and the Iberian Peninsula. From
the fifteenth century onwards (and possibly earlier), the refrain was
sung in four-part polyphony. Nevertheless, people began gradually to
lose sight of the origins of the tradition. In the sixteenth century,
for example, most of the non-Gregorian pieces were looked upon as
intruders which distorted the essence of the rite and their elimination
was inevitable. The song of the Sibyl was almost totally abandoned by
the end of the century after its performance had been forbidden by the
Council of Trent (1545-1563). So far as Majorca was concerned, however,
even though it was forbidden in 1572, it was restored three years later.
The church authorities sought once again to have it forbidden and any
performance required written authorisation. It must have been
re-established under generous conditions, for the tradition of
performance of the song has been maintained right up to the present day.
Practice
in Majorca suggests that it resulted from several traditions. Moreover,
there is evidence from the fourteenth century that the song in Latin
was fully integrated into the liturgy for matins. In our times, it is a
young boy dressed in red and brandishing a sword who intones the first
line in Catalan, 'Al jorn del iudici', after the final Te Deum of matins
in Palma Cathedral. According to the musicologist Paul Aebischer, this
is a 'last echo of the procession of the prophets'.
On the
present recording, Gisela Bellsolà sings a traditional Catalan version.
The polyphonic refrain for four voices interpreted by the Obsidienne
ensemble is taken from a manuscript dating from the beginning of the
sixteenth century and housed in Barcelona (ms. 7 f1). The main melody is
given to the soprano doubled at the third by the alto with the
remaining voices providing a homorhythmic counterpoint.
As an introductory piece, there is a Cantiga de Santa Maria by Alphonso the Wise (1252-1284), Madre de Deus, ora por nos teu Fill' essa ora, played on bagpipes. This contrafactum1
written over the melody of the song of the Sibyl bears witness to its
popularity in the Iberian peninsula in the thirteenth century. The
bagpipes bring the prophetic song to a close with a Benedicamus Domino taken from the manuscript of the Las Huelgas Monastery (early fourteenth century).
The Barcelona Mass
The
development of polyphonic liturgy would seem to have been under threat
at the beginning of the fourteenth century. Firstly, music, like
society, began to take on a secular character; Guillaume de Machaut, for
example, in spite of being a canon in Reims Cathedral, was composing
profane songs in the main. Secondly, the Church itself was actively
discouraging composers from using the innovations of the Ars nova. Pope
John XXII, recently installed in Avignon, tried via a decree in 1324 to
forbid the new musical practices. He fustigated those musicians who
'intoxicate people's ears instead of calming them' and who, 'when
singing ecclesiastical melodies [.. .1 overload them with short notes'
and distort the melodies with hocket2 and set motets to
frivolous words. It is therefore somewhat paradoxical that most of the
liturgical polyphonic pieces came from the chapels of the Popes and the
cardinals installed in Avignon and in the Comtat Venaissin at the time
of the 'Babylonian captivity' (1305-1378) and then of the Great Schism
(1378-1417).
The Ivrea and the Apt manuscripts are the two main
sources of this new repertory. They contain parts of the Ordinary of the
Mass (Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus and Ite missa est), composed
separately and classified by genre. This corpus is original in
character. Previously, there were few examples of polyphonic settings
for choir of the unchanging texts of the mass. The composers of the
Notre-Dame school (1160-1225) laid emphasis on the chants of the Mass
Proper, whose contents are specific to each festival; in their organa, only the solo parts of the responsorial chants (Graduel, Alleluia, responses) are treated polyphonically.
There
are four other manuscripts, compiled in the musical circles of the
papal court at Avignon, which provide a selection of polyphonic chants
for the Mass Ordinary, presented according to the order of the liturgy.
These four anonymous cycles are at present designated by the name of the
place where they are housed or where they were found. The oldest is the
Tournai Mass, which was copied out in the first half of the
fourteenth century; it perhaps inspired Guillaume de Machaut in the
composition of his own Notre-Dame Mass (c.1363). Then there is the Toulouse Mass and the Sorbonne Mass (sometimes called the Besançon Mass). Finally, there is the Barcelona Mass,
which is conserved in the first folios of manuscript 971 in the
Catalonia Library; it was probably copied out in the kingdom of Aragon
at the end of the fourteenth century or the beginning of the fifteenth.
The
notion of the mass as it is understood today arose from the appearance
of these polyphonic cycles of the Mass Ordinary. Nevertheless, the term
did not yet designate a unified musical structure. Most of the pieces
assembled to constitute a complete Mass Ordinary were independent
compositions. For example, the Gloria, the Credo and the troped3
Sanctus of the Barcelona Mass were also copied out as isolated pieces
in the Apt manuscript. These pieces, borrowed from the Avignon
repertory, bear witness to the close links established between the royal
house of Aragon and the papal city. The composer of the Credo, the
Augustinian friar Steve de Sort, was recommended to Juan Ist of Aragon (d.1396)
by his ambassador in Avignon. He was engaged as organist of the chapel
in September 1394, and on the death of the king, he continued in the
service of his successor, Martin I (d. 1410) until March 1407
Thanks to these biographical details, the Catalan musicologist Maria
Carmen Gómez has been able to place the date of the production of the
Barcelona manuscript at probably somewhere between 1395 and 1410, i.e.
during the time of the composer's residence at the court of Aragon.
The
other four parts of the mass are anonymous and the cycle lacks internal
coherence, in particular as a result of the presence of a number of
different styles of musical writing. In the fourteenth century, there
were three distinct styles of composition for the polyphonic movements
of the Mass Ordinary: the simultaneous style, the motet style and the
song style. The latter become prominent at the end of the fourteenth
century, notably in the Aragon repertory. This evolution reveals that in
spite of the official injunctions of the religious authorities, the
predominance of profane works exercised great influence on the composers
of liturgical music.
Four of the movements in the Barcelona Mass
are for three voices. In the Kyrie, the voices sing in homophonic
counterpoint. This simultaneous style is disrupted by syncopations at
the end of the Christe and by a hocket in the middle of the second
Kyrie. The writing of the Credo is close to song style: the upper voice (cantus) sings the text and it is sustained by two lower voices (tenor and contratenor). This schema is modified in the Gloria, for the contratenor adopts the same tessitura as the cantus; moreover, the sections of the liturgical text alternate with the verses of the Splendor patris trope.
The Sanctus is a true isorhythmic motet4. Two voices each sing the text of a different trope, whilst an identical rhythmic pattern (talea)
is repeated six times by the third voice. The Barcelona Mass ends with a
quite remarkable Agnus Dei: it is for four voices, which results in
denser writing than in the other movements; a final hocket lends
animation and breadth to the conclusion.
The 'Catalan' cycle
comprises only five parts. The closing piece here has therefore been
borrowed from the Ivrea manuscript. It consists of an isorhythmic motet
for four voices, the tenor5 of which has not yet been identified. The two tropes Post missarum/Post missa come to an end with 'Deo gratias', which is the usual response after the proclamation 'Ite missa est' or `Benedicamus Domino'.
Translation: John Sidgwick
1. CONTRAFACTUM. — Widespread medieval practice consisting in setting new words to pre-existing melodies.
2.
HOCKET. — Composition technique whereby the notes of a melody are
distributed between two or more voices, each voice-part being
interrupted by rests. When one voice sings a note, the other voices are
silent, then in turn take up the melody, the roles being inversed. These
alternations take place very quickly.
3. TROPE. - Text or melody — or both — added to, or inserted into, a pre-existing chant.
4.
ISORHYTHMIC MOTET. — Medieval piece for several voices in which each
one sings a different text and in which the tenor (see note 5)
repeatedly sings the same rhythmic pattern, which is generally made up
of long notes.
5. TENOR. — A pre-existing melody used as the
basis for a polyphonic composition, the other voices being added above
it, and sometimes below.