medieval.org
constantinople.ca
Atma "Classique" ACD 22383
2006
L'embarquement à bord de la caraque.
1. Louange à la mer [6:06]
(CANTIGAS DE SANTA MARIA / KIYA TABASSIAN)
CSM 12 ?
Le périple méditerranéen.
2. Barabam (GUY ROSS) [4:31]
3. Vermiculus (GUY ROSS) [5:47]
Traversée de la mer Égée sur les côtes de
la Turquie.
Passage sur les îles de Rhodes, Chio, Leros et
Mytilène.
4. Parfum des steppes (GUY ROSS) [9:43]
Sur la galiote, à la rame.
5. Kürdi pishrow, Devr-é kebir (SULTAN KORKUT, 1467-1513) [5:43]
6. Beyâti pishrow, düyek (ACEMLER, 1500-1525) [5:03]
Traversée de l'Iran, de Tabriz à Khorassan
en passant par Téhéran, Damghan et Neyshabour.
7. Ossoul (RADIF PERSAN) [4:42]
8. Châhâr-gâh (IMPROVISATION) [2:31]
9. Hodi (CHO FARDÂ BARÂYAD...) [3:23]
10. L'ivresse de koumiss [5:02]
(CANTIGAS DE SANTA MARIA / KIYA TABASSIAN)
no percibo ninguna cantiga en esta pista, pero sí en la siguiente.
Tal vez sea una errata del libreto
Entrée dans le pays de Samarkand, visite du Palais Blanc,
grand festin à la cour et rencontre de Tamerlan.
11. Gachyari Garalar (CHANT OUZBEK) [4:29]
( ¿ CANTIGAS DE SANTA MARIA CSM 315 ? )
Les
palais de soie et de toile des épouses de Tamerlan, fêtes nuptiales.
Souffrant, Tamerlan ferme sa porte et l'ambassade doit partir.
12. Ranolan Mosun (CHANT OUZBEK) [4:12]
Retour en Castille.
13. Con razon nas creaturas | Non pod'ome pela Virgen [7:54]
(CANTIGAS DE SANTA MARIA)
CSM 342
CSM 127 ||
( + CSM 25 )
CONSTANTINOPLE
Kiya Tabassian
Guy Ross, luth, oud, chant
Ziya Tabassian, tombak, dayereh, daf, santour, percussions
Kiya Tabassian, setar, setar pousti
Matthew Jennejohn, flûtes à bec, cornets à bouqin et muet
Elin Söderström, viole da gambe, vielle
Cet
enregistrement a été rendu possible grace à l'aide
du Fonds de la musique de Canada et
du Service de la musique du Conseil des Arts du Canada.
Réalisation, enregistrement et montage: Anne-Marie Sylvestre
Église Saint-Augustin, Saint-Augustin de Mirabel (Québec)
Les 1er, 2 et 4 décembre 2005
Révision: Sally Campbell et Marie-Noël Laporte
Graphisme: Diane Lagacé
Couverture: © Getty Images
Photos: José-Luis Castillo
Le
23 mai 1403, Clavijo et ses compagnons quittèrent le port de Cadix aux
bords d'une caraque pour se rendre à la capitale d'Asie, la ville de
Samarkand. C'était la mission que Henry III avait donnée à son
ambassadeur, Clavijo, homme noble, courtois et éloquent : avec cette
ambassade, le roi de Castille envoyait des lettres officielles dans
lesquelles il exprimait son souhait de développer des relations d'amitié
avec l'empereur Tamerlan, lettres accompagnées il va sans dire de
nombreux présents. L'expédition fut de retour à Castille 34 mois plus
tard, le 24 mars 1406.
Clavijo entreprit d'écrire son journal de
voyage dès le premier jour et poursuivit jusqu'à la dernière journée de
cette mission. Il y décrivit avec constance et minutie les détails des
endroits visités ou traversés, des événements marquants, de ses
rencontres.
Ce cahier de voyage, à part sa grande valeur
littéraire, due certainement au talent de Clavijo pour le récit et à sa
maîtrise exceptionnelle de la langue castillane médiévale, nous laisse
les traces d'un parcours à la fois symbolique et inspirant. Il nous
éveille d'abord à un désir d'harmonie et de rapprochement de la part des
dirigeants de deux puissances, autant dire deux continents, l'Asie et
l'Europe, et montre surtout l'ouverture et la vision d'un homme tel
Clavijo, qui traversa en quelques années de multiples pays par de
multiples moyens...
Ce cahier de voyage a donc été le point de départ de notre projet De Castille à Samarkand.
Nous avons souhaité reprendre l'itinéraire de Clavijo pour nous plonger
dans la richesse musicale qu'il renfermait et examiner de l'intérieur,
dans son contexte, les traditions musicales de l'époque des Timurides,
de la Transoxiane jusqu'à l'ouest de la Méditerranée, l'Espagne. Ce
projet a traversé l'imaginaire de chacun de nous, alors que nous nous
sommes trouvés là, devant la splendeur des lieux, des odeurs, des
paysages et des peuples parsemés le long de la Route de la Soie.
Ici,
l'ensemble Constantinople pose un regard original sur la musique du
XIII e au XVIe siècles en Espagne, en Italie, en Grèce, en Turquie, en
Arménie, en Perse et en Ouzbékistan, et s'appuie sur des recherches
musicologiques basées sur des manuscrits originaux. Ces recherches sont
jumelées à une approche vivante de la tradition musicale de ces
cultures.
Toutes époques confondues, on s'est plu à considérer le
XVe siècle comme étant l'âge d'or de la musique persane et de la
musique d'Asie centrale. Les cours des rois Tamerlan, Baighara et
Shahrokh accueillaient et éduquaient alors les musiciens, les
compositeurs et les théoriciens les plus remarquables de l'Histoire de
la musique orientale. En parallèle, l'Europe méditerranéenne foisonnait
de musiques monodiques et l'apogée cet art se reflétait dans des œuvres
telles que le corpus des Cantigas de Santa Maria, un recueil d'estampies
italienne et françaises.
Ainsi, nous avons pris ce trajet
célèbre et l'avons transformé en une sorte de périple musical. En nous
alimentant des sources d'époque, tant musicales qu'historiques, des
régions parcourues par Clavijo, nous avons essayé de revisiter son
chemin, à notre manière, en musique.
Louange à la mer est une pièce basée sur
plusieurs cantigas, reliés entre eux par de nouveaux
éléments mélodiques. Barrabam et Vermiculus sont des compositions originales inspirées de ces sources remontant au Moyen-Âge, tandis que Parfum des steppes regroupe plusieurs chants et mélodies recueillis en Grèce et en Turquie.
Les pishrow Kürdi et Beyâti
sont des compositions qui nous parviennent des deux sources manuscrites
les plus importantes pour la musique ottomane et persane du XVe au
XVIIe. Il s'agit de la collection de Cantemir et du livre Suz o Saz
d'Albert Bobowsk (Ali Ufki, après sa conversion à l'islam). Le pishrow
Kürdi est une composition du Sultan Korkut et le Beyâti est une œuvre
anonyme dont Cantemir nous indique que le compositeur était iranien et
que, par sa forme et son style, on l'attribuerait généralement aux
premiers musiciens iraniens ayant vécu et Constantinople au début du XVI
siècle. Bien que ces œuvres soient de quelques décennies plus tardives
que le voyage de Clavijo, elles représentent tout de même bien, selon
nous, l'environnement musical de Constantinople lors du passage de
Clavijo.
Ossoul et Hodi, toutes deux dans le mode tchâhâr-gâh, font aujourd'hui partie du répertoire (Radif)
de la musique persane. Ces pièces anonymes sont
considérées parmi les plus anciennes de cette tradition
musicale. L'ivresse de koumiss est une synthèse entre un chant des Cantigas de Santa Maria (le n° 52) et le mode persan, le tchâhâr-gâh.
Gachyari Garalar et Ranolan Masun sont des chants ouzbeks toujours vivants et chantés par les musiciens ouzbeks
Nous
achèverons notre périple par une pièce qui regroupe trois cantigas et
dans laquelle nous avons tenté d'illustrer en son les moments forts et
les émotions qu'aurait pu vivre Clavijo, et aussi d'évoquer les musiques
qu'il aurait entendues tout au long de son voyage.
On
May 23, 1403, Clavijo and his companions set sail from the port of
Cádiz, headed for the city of Samarkand, the capital of Asia. Henry III
had given a mission to his ambassador, the noble, courteous, and
eloquent Clavijo — the king of Castille was sending official letters in
which he expressed his wish to develop friendly relations with the
emperor Tamerlane, letters accompanied no doubt by numerous gifts. The
expedition returned to Castille 34 months later, on March 24, 1406.
Clavijo
began writing a journal of his trip on the very day of their departure,
and he continued to record his experiences until the last day of the
mission. With a steadfast attention to detail, he described the places
he visited and explored, events that occurred, and people he met.
This
travel notebook, apart from its great literary value — thanks to
Clavijo's talent for story-telling and his exceptional mastery of the
medieval Castilian language — leaves us traces of a journey at once
symbolic and inspiring. It allows us to discover a desire for harmony
and rapprochement on the part of the leaders of two powers — or rather
two continents, Asia and Europe. Above all, though, it shows the
openness and vision of a man such as Clavijo, who traveled across many
countries, by many means, throughout many years.
This travel diary has been a point of departure for our project From Castille to Samarkand.
We wanted to follow Clavijo's itinerary, in order to immerse ourselves
in this musical richness and examine, from the inside and in context,
the musical traditions of the period, from the Timurids of Transoxiana
all the way to the west of the Mediterranean, Spain. The project has
captured the imagination of each one of us as we found ourselves faced
with the splendor of the places, the odors, the landscapes, and the
peoples of the- Silk Route.
In this project, Ensemble
Constantinople provides an original view of the music of the thirteenth
through the sixteenth centuries in Spain, Italy, Greece, Turkey,
Armenia, Persia, and Uzbekistan. The group has relied on musicological
research based on musical manuscripts that have survived from this
historical period, combined with a fresh approach to the musical
traditions of these cultures.
Among all historical periods, the
fifteenth century is often considered the golden age of the music of
Persia and of central Asia. The courts of Kings Tamerlane, Baighara, and
Shahrokh welcomed and educated the most remarkable musicians,
composers, and theoreticians of the period in these regions. At the same
time, Mediterranean Europe abounded in monodic music, and the peak of
this art was reflected in works such as the collection of Cantigas de Santa Maria, and Italian and French estampies.
We
have taken this celebrated route, therefore, and transformed it into a
sort of musical peregrination. Using musical and historical sources from
the regions visited by Clavijo, dating from the period of his travels,
we have attempted to revisit his journey in our own way, through music.
In praise of the sea is a piece based on several cantigas connected to each other by new melodic elements. Barrabam and Vermiculus
are original compositions inspired by sources from the Middle Ages,
while Perfume of the steppes groups together several songs and melodies
collected in Greece and Turkey.
The pishrows Kürdi and Beyâti
are compositions that come to us from the two most important manuscript
sources of Ottoman and Persian music of the fifteenth to seventeenth
centuries. These are the collection by Cantemir and the book Suz o Saz by Albert Bobowski (Ali Ufki, after his conversion to Islam). The pishrow Kürdi is a composition by Sultan Korkut. Beyâti
is an anonymous work, although Cantemir indicated that the composer was
Iranian and that, considering its form and style, it could be
attributed generally to the first Iranian musicians who lived in
Constantinople at the beginning of the sixteenth century. Even though
these works were composed some decades after Clavijo's trip, we think
they nevertheless represent quite well the musical environment of
Constantinople as he experienced it.
Ossoul and Hodi, both in the mode tchâhâr-gâh, form part of today's repertoire (Radif) of Persian music. These anonymous pieces are considered among the most ancient of this musical tradition. Drunk on koumiss is a synthesis between a song from the Cantigas de Santa Maria (number 52) and the Persian mode, the tchâhâr-gâh.
Gachyari Garalar and Ranolan Masun are Uzbek songs still very much alive and sung by Uzbek musicians.
We complete our voyage with a piece that unites three cantigas,
and in which we have integrated allusions to moments lived and to
emotions felt by Clavijo, and also to the music he might have heard
throughout his journey.
KIYA TABASSIAN
TRANSLATED BY SALLY CAMPBELL