medieval.org
Accord 220812
1987
Enregistrement numérique réalisé à
Vienne en mars 1987 au Prälatensaal, Studio Benkö
1. Biflauto [4:57] René Clemencic —
flûte à bec double
2. Ballade [3:35] an. Abbaie de Lyre —
flûte en corne
Martin CODAX. Cantigas de Amigo
3. Ca III [1:33]
flûte pastorale, sistre
4. Ca I [1:35]
cheremia
5. Ca II [2:19]
petit flûte pastorale, darabukka
6. Alba [4:27] Guiraut de BORNELH —
flûte à bec Moyen-Âge ténor
7. Omnis mundus jucundetur [3:05]
cheremia, tambour
Cantigas de Santa María
8. CSM 200 [1:41]
flûte en roseau, tambourin
9. CSM 37 [1:29]
petit flûte en roseau
10. CSM 176 [2:40]
sifflet
11. CSM 73 [1:58]
flûte à bec double, tom-bak
12. Mahour [9:12] Esmail Vasseghi —
santur
13. Flauto Magico [13:33] René Clemencic —
flûte à bec (alto, basse, sopranino)
14. Improvisations sur le Tom-Bak [8:32] Esmail Vasseghi
15. Orientis partibus [Beauvais] [1:36] —
garkleinflötlein, santur
René Clemencic
flûte à bec double, flûte en corne, flûte pastorale, petit flûte pastorale,
cheremia, flûte à bec Moyen-âge, flûte en roseau, petit flûte en roseau
sifflet, flûte à bec baroque (alto, basse, sopranino), garkleinflötlein
Esmail Vasseghi
santur, tom-bak, sistre, darabukka, tambour, tambourin
L'élixir d'or / Musique spontanée.
C'est en revenant au départ, à
l'origine, à la spontanéité des sources que l'on acquiert l'élixir d'or
de la jouvence éternelle, la fleur dorée des mélodies taoïstes. En
musique, je recherche toujours le jaillissement de la source,
l'élémentaire, l'original. C'est pourquoi la musique ancienne et la
musique contemporaine ont toujours exercé sur moi un attrait
particulier, car elles permettent — et même exigent, dans une certaine
mesure — spontanéité et improvisation. Or, j'eus la chance de rencontrer
Esmail Vasseghi, musicien persan qui occupe une place importante. La
musique persane allie, en effet, de façon exemplaire, spontanéité et
sens classique des proportions. Nous essayons, dans nos programmes
communs, de faire sentir une certaine parenté d'origine que partagent la
musique européenne et la musique persane du passé et du présent. Car,
non seulement les extrêmes se touchent, mais les origines également.
La
musique persane remonte a des traditions extrêmement anciennes, dont
l'origine se perd dans la nuit des temps les plus reculés. Elle fait
partie des grand des traditions musicales — peu nombreuses — qui sont
encore vivantes notre pauvre époque. Le monde merveilleux de ses modes
mélodiques et rythmiques complexes continue, comme de tout temps, à nous
captiver. Ces modes sont un genre de gammes, d'agencements de diverses
tonalités. Par l'emploi de tons, de demi-tons et d'intervalles
approchant les quarts de tons, l'on obtient un plus grand nombre
d'intervalles que dans notre musique classique européenne. Parmi les
cinq modes, l'un d'eux correspond à peu près à notre mode majeur, un
autre, au mode mineur, tandis que les divers autres modes n'ont pas
d'équivalents chez nous. Ces modes procèdent de 7 dastgah
c'est-à-dire de principes d'organisation pour l'interprétation et
l'improvisation libre. Leur structure est comparable à un arbre. Il
existe sept arbres, tous semblables, en principe, mais différents par
leurs feuilles et leurs fleurs. Non seulement le mode leur donne leur
caractère spécifique, mais aussi les motifs, les figures du jeu, etc.
qui leur sont propres. Les formes musicales utilisées sont identiques
pour tous les dastgah.
La partie essentielle d'un dastgah s'appelle l'avas.
Il comprend lui-même plusieurs sections qui correspondent au tronc d'un
arbre (fixation d'un mode), à ses branches principales et secondaires
(motifs d'interprétation libre), ainsi qu'à un retour au tronc, à la fin
du morceau ou à une extrémité de section. D'autres formes (parties
rapides dont le rythme exige de la virtuosité, improvisations lentes,
rythmiques et plutôt libres, avant les parties « tronc », etc.) sont
jouées, généralement, combinées aux avas. Le solo pour santur est un dastgah mahour. Les improvisations sur le tombak utilisent, en partie, des rythmes persans classiques.
Les
morceaux européens du Moyen-Age sont des versions instrumentales de
mélodies connues. Excepté quelques danses, peu nombreuses, aucune
musique instrumentale du Moyen-Age n'a été conservée jusqu'à notre
époque. Les limites, dans ce domaine, sont souples et fluctuantes, tout
comme dans la musique populaire européenne traditionnelle ou dans le
jazz. Les parties vocales sont interprétées par des instruments et vice
versa. Il peut y avoir des parties improvisées, au début et entre les
strophes de la mélodie. La parenté mélo- clique avec le chant grégorien
ou avec le côté « danse populaire » est évidente.
Le Biflauto est une improvisation qui puise dans les
éléments mélodiques, rythmiques et formels de la
musique populaire ancienne.
Le Flauto Magico
veut ressusciter la magie sonore originelle de la flûte. Cet
instrument, en effet, est l'instrument aérien, l'instrument A vent par
excellence, comme l'indique son nom dérivé du latin « flatus »,
c'est-à-dire : le souffle, le vent, l'haleine. La respiration est la
fonction vitale primordiale. Ne dit-on pas que l'Homme s'éteint en
rendant « son dernier souffle » ? L'Homme s'extériorise en transformant,
en quelque sorte, cette respiration et ce souffle par les pleurs, les
soupirs, le rire, etc. Le Flauto Magico allie des techniques
traditionnelles de jeu A des techniques nouvelles (jeu d'accords, sons
de flageolet, sons chantés, etc.) pour évoquer tout ce qu'il y a de
particulier, de magique, de merveilleux dans la flûte. La première
partie évoque la magie de la grande aventure, la deuxième partie, le
recueillement et la troisième partie, la magie des désirs orgiaques.
René Clemencic
L'élixir d'or / Spontaneous music
It is when you return to the point of departure, to the origin, to the spontaneity of sources, that you acquire the élixir d'or
or eternal youth, the golden flower of taoist melodies. In music, I
always seek out the freshet from the spring, the elementary, the
original. That is why ancient music and contemporary music, have always
had a particular attraction for me, since they allow for, and even
require, to a certain extent, spontaneity and improvisation. Now I had
the good fortune to meet Esmail Vasseghi, an important Persian musician.
Persian music combines, in an outstanding way, spontaneity and a
classical sense of proportions. We try, in our shared programmes, to
help our listeners feel a certain kinship between European music and
Persian music from the past and from the present stemming from their
common origin. For not only do extremes meet, but origins do, too.
Persian
music goes back to extremely ancient traditions, the real origin of
which is lost in the mists of time. It is one of the few great musical
traditions that are still alive in our sad times. The wonderful world of
its melodic modes and complex rhythms continues, as it always has, to
captivate us. These modes are a sort of scales, of arrangements of
various tonalities. Through the use of notes, half-notes, and intervals
approaching quarter-tones, you get a greater number of intervals than
you have in our classical European music. Of the five modes, one
corresponds approximately to our major mode; another, to our minor mode;
while the various other modes have no equivalent for us. These modes
proceed from 7 dastgahs, or principles of organization for
interpretation and free improvisation. Their structure is comparable to a
tree. There are seven trees, all alike in principle, but differing in
their foliage and bloom. Not only does the mode give them their specific
character, but it also provides them with their own motifs and figures
of play, etc. The same identical musical forms are used for all the
dastgahs.
The main part of a dastgah is called the avas.
The avas itself includes several sections which correspond to the trunk
of a tree (determination of a mode), to its main and secondary branches
(motifs for free interpretation), and also to a return to the trunk, to
the end of the piece or to the end of a section. Other forms (quick
tempo parts the rhythm of which requires virtuosity on the part of the
performer, and slow, rhythmic and rather free improvisations, before the
"trunk" parts, etc.) are played, generally, combined with the avas. The
solo for santur is a mahour dastgah. Improvisations on the tombak make use, in part, of classical Persian rhythms.
European
musical pieces from the Middle Ages are instrumental versions of the
well known sung melodies of that time. Except for a few dances, no
instrumental music from the Middle Ages has been preserved down to our
time. Definitions in this field are flexible and fluctuating, as is the
case with traditional European popular music or with jazz. The vocal
parts are interpreted by instruments, and vice versa. There may be
improvised parts, at the beginning and in between the stanzas of the
melody. The melodic relationship with Gregorian chant or with "popular
dances" is obvious.
The "Biflauto" is an improvisation that owes a
great deal to the melodic, rhythmic, and formal elements of the ancient
popular music.
The "Flauto Magico" is an attempt to resuscitate
the original sonorous magic of the flute. This instrument, indeed, is
the light and airy wind instrument "par excellence", as is indicated in
its name, derived from the Latin "flatus", which means blowing, wind,
breath. Breathing is the primary vital function. Is it not said that man
dies "breathing his last"? Man makes his feelings known by transforming
this breathing and this breath into tears, sighs, laughing, etc. The Flauto Magico
combines the traditional techniques of playing with new techniques
(providing such effects as chords, harmonics, vocal sounds, etc.) to
evoke everything that is so particular, so magical, so marvellous in
flute music. The first part evokes the magic of big adventure; the
second part, meditation; and the third part, the magic of orgiastic
desires.
René Clemencic